L'aube le soir ou la nuit
Nous avons lu le livre de Yasmina Reza, "L'aube le soir ou la nuit". Elle y montre une sympathie évidente pour le sujet de son portrait, Nicolas Sarkozy. Elle y montre aussi un détachement amusé devant des préoccupations dont elle mesure l'ampleur, mais qui ne sont tout simplement pas les siennes. Elle enveloppe Nicolas Sarkozy et son entourage d'un regard vigilant et curieux, relève les paradoxes et les fanfaronnades comme les tours de force et les instants de solitude. Son livre offre, par delà l'image publique, une nouvelle lecture du président français. Mieux que le récit des coulisses de la conquête du pouvoir -la campagne présidentielle n'est, au fond, que le décor où évolue le personnage- c'est la mesure d'un homme qui est faite, au plus haut relief de sa vie.
Souvent dans les oeuvres de Yasmina Reza les personnages trompent le temps, incapables de l'habiter eux-mêmes. "L'aube le soir ou la nuit" est à la fois l'anthitèse et le paroxisme de cette
impossibilité. Celui qu'elle raconte (car elle ne décrit pas vraiment) veut s'approprier le destin et se rendre maître du temps, en disposant de lui à sa guise. Il veut créer le temps, lui imposer son tempo personnel et se retrouve finalement en décalage constant avec lui, ses actes plus lents que ses désirs, ses mots plus tardifs que ses ambitions. Il est en quelque sorte toujours en arrière de lui-même.
Ce personnage là ressemble à tout le monde et il est presque impossible de ne pas sentir de la sympathie pour lui (mais pas d'empathie, qui exige plus de distance). On doit lui reconnaître pourtant plus d'énergie, moins de fatalisme qu'aux autres. Comme le dit si joliment un ami de l'auteur: "Homme politique c'est un métier de con pour gens intélligents".
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