16 février 2007

"L'idéee fixe" au théâtre Edouard VII

Nous avons vu ce soir L'IdéeFixe au théâtre Edouard VII: un régal complet, pour les acteurs, la mise en scène et, surtout, le texte de Paul Valéry.
Le texte d'abord où, sur fond de solitude obligatoire, un écrivain déprimé affronte verbalement le bon sens à toute épreuve d'un médecin florissant. A tout ce que l'écrivain avancera, celui-ci lui opposera une intélligence saine, pratique et amusée. Cette attitude aura pour vertue de pousser l'écrivain à tenter de convaincre et à approfondir sa pensée en l'expliquant.
Au fil des conversations, les thèmes abordés ont tous trait aux rapports compliqués de l'homme à sa vie. Il faut se positionner entre l'évidence et l'absurde qui se manifestent tour à tour. Pour ce faire, la manière dont on s'approprie le temps, entre "intensité" et "netteté" est déterminante. Elle révèle ce que chacun appréhende de lui même et ce qu"il ose affronter. "Ce que l'homme a de plus profond, c'est sa peau". Dès lors, le trouble vient de ce que l'auteur appelle "l'implex" et qui représente pour chaque individu le champs de son possible. Le renoncement et les fluctuations sont inévitables (il n'y a pas d'idées fixes!). Pourtant, chacun a l'intuition d'une idée pure, hors du temps et détachée de toute contingence, vers laquelle il tend confusément. C'est cette idée qui nous tient debout.

Paul Valéry réussit le tour de force de rendre ce mécanisme sensible à travers ses deux personnages, à le distiller dans la conversation sans le perdre de vu ni le rendre indigeste.
La mise en scène de Bernard Murat est brillante. Elle répond parfaitement aux thèmes de la pièce. La polarité des attitudes possibles est incarnée par les deux personnages, aussi différents qu'indispensables l'un à l'autre. Le jeu de Bernard Murat est subtil et relance au moment juste celui de Pierre Arditi.. Celui-ci, toujours aussi délicieusement cabotin, vous tient en haleine, allégeant une pensée grave par une moue comique, attirant l'attention sur la profondeur d'un mot avec un tic douloureux. Ses mots sont vivants à tout instant. Le duo est dynamique, intélligent et juste; il prolonge dans les gestes et les intonations les joutes verbales des deux personnages.
Procurez vous le texte de la pièce ou, mieux encore, courez la voir: on n'y parle que de vous!

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